
Toubib et maintenant
L'édito de la semaine
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Quelques chiffres : en 2025, 22% des médecins français se déclarent en burn-out*. 11% des patients majeurs n'ont pas de médecin traitant. 30% de la population française vit dans un désert médical**. 87% des médecins aiment prendre un verre avec des amis. 17% sont plutôt malheureux dans leur travail. 58% y sont plutôt heureux ou très heureux.*
On espère fort qu'Angel soit heureux, quelques temps après Toubib – après qu'on l'a laissé à la fin du film poursuivre sa carrière de médecin, dont on nous raconte là les douze premières années. Antoine Page, le réalisateur, a filmé son petit frère Angel Page (« comme une page » dit-il) depuis la toute première année d'études jusqu'aux choix professionnels qui s'affirment, bien après. Et il y a de quoi cogiter, pendant tout ce temps : sur la nature des études, sur l'origine de la « vocation », sur les choix de carrière qui sont aussi et surtout des choix politiques. Douze ans : de quoi avoir l'impression de bien le connaître et de quoi s'attacher à ce jeune homme. De quoi lui connaître des coiffures variées, des tourments, et des mots réfléchis et touchants. Ce n'est pas tous les jours qu'on passe tant d'années avec quelqu'un, dans un film, et le grand frère Antoine le fait très, très bien. Oui, nous vous invitons à suivre Angel dans Toubib.
Pour la journée mondiale de lutte contre le sida ce 1er décembre, mais aussi pour toutes les journées de l'année, voilà un autre film ample, un journal du temps long : Et maintenant ?. Joaquim Pinto, réalisateur, producteur, ingénieur du son, éditeur, bref : figure du cinéma portugais, se met en retrait du travail, à la campagne, avec son mari Nuno Leonel et leurs chiens. C'est que Joaquim vit depuis 20 ans avec le VIH et l'hépatite C. Entamant un nouveau protocole, il va tenir un journal filmé, « pour ne pas se perdre, pour garder le fil face aux crises qu’il traverse, qui le traversent. Celle de son corps en lutte contre les maladies et contre les médicaments censés lutter contre ces maladies. Celles du monde tout entier, où l’humain s’est dépossédé du reste du vivant jusqu’à en perdre son sens. » écrit Charlène Dinhut. Un combat personnel pleinement ancré dans l'histoire politique et collective, un film qui est aussi un chant d'amour, d'amitié, d'espoir et de survie !
La Voie normale « n'est pas seulement une chronique sociale mais aussi une plongée dans un service public dysfonctionnel », écrit Olivier Barlet. Ça ne se déroule pas dans un hôpital en France, non, mais sur les chemins de fer tunisiens. La « voie normale », c'est le nom que donnent les cheminots à la première voie ferrée du pays – et aussi la plus délaissée. Laisser les services publics à l'abandon, risquer la vie des usagers autant que celle des travailleurs... c'est évidemment d'une société toute entière qu'on parle là. Et la réalisatrice le fait ici avec poésie : embarquée, comme dans une sorte de road-movie, elle témoigne avec sensibilité de la dignité de ces cheminots, de leur travail et de leurs résistances.
Il y a aussi des grosses machines dans Terrarium. Et il y a aussi des petites bêtes. Et c'est toute l'astuce de ce court métrage de nous faire perdre le sens des échelles. En quoi le ver de terre est-il aussi – voire plus – puissant que la pelle mécanique ? Que fait-on de notre terre, avec nos gros bulldozers ? Qui mange le sol et comment et pourquoi ? Que partagent le lombric et les couches géologiques ? Un beau film, dans lequel « tout se retrouve dessus-dessous » !
Bons films !
* Enquête Medscape « les médecins français sont-ils heureux ? » 2025
** Rapport sénatorial, mars 2022
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