
Archives amateures, amateur·es d'archives
L'édito de la semaine
Tous les vendredis, nos programmations sont accompagnées d'un édito qui vous présente les films de la semaine. Vous pouvez le recevoir par mél en vous inscrivant à la newsletter, mais aussi retrouver toutes les archives ici !
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Au baptême de la nièce il y avait toujours un oncle doté d'une caméra 8mm, VHS, Hi8, MiniDV dernier cri. Il en tirait des images joyeuses et animées qu'on partageait dans la famille et qui au fil des années se sont perdues avec l'obsolescence des formats, rangées dans une boîte en carton dans le placard de la chambre laissée inoccupée par le départ du petit dernier. À la fête du village, chacun, aujourd'hui, fabrique ses propres petites images qu'il stocke dans la mémoire interne de son smartphone. Les formats et les époques changent, les images s'accumulent. Et une ample documentation anonyme et dispersée se crée, celle de nos vies intimes, locales, amicales, une mémoire immense.
Parfois ces archives sortent de leurs boîtes et nous parviennent. C'est le point de départ de l'Escale de la semaine : Archives amateures, amateur·es d'archives, programmée par Esther Mazoviecki, en partenariat avec Ardèche Images.
À l'origine de Ils sont toujours là : un dispositif de collectes d'archives en Ardèche, qui a réuni de nombreuses images du territoire, de sa vie quotidienne, de celle du travail, des familles, des villages... Dont celles filmées d'un balcon à Lussas en 1945 : des habitants préparent un défilé spécial pour marquer le début d’une nouvelle ère... Voilà un point de départ pour réunir, au présent, des témoignages, réactiver la mémoire et reconstruire un territoire, par la parole.
« Revitaliser » les archives, voilà, leur donner âme et une nouvelle vie, par les mots.
Lorsqu'il y a très peu d'images, peut-être qu'on peut les regarder encore plus. Dans Three Minutes: A Lengthening, c'est trois minutes d'archives, pour une heure de film. Comment ? En scrutant ce qui est précieux. Ce qui va se perdre : des images des rues d'un quartier juif de Pologne, en 1938. Des hommes, des femmes, des enfants qui vivent là. Trois minutes qu'on fait durer, comme pour reporter la fin qu'on leur connaît. Esther Mazowieci écrit : « Voir, et revoir, et enquêter, détecter, s'accrocher au moindre indice, au moindre détail pour révéler l'identité du lieu, et des personnes filmées qui allaient disparaître sans laisser aucune trace. Un film cénotaphe, qui permet le recueillement, la commémoration de ces personnes sans sépultures. »
Obscure White Messenger est construit à partir d'archives anonymes. Il raconte une histoire incroyable, qui nous fait plonger dans la tête de Dimitri Tsafendas : l'homme qui en 1966 a assassiné Hendrik Verwoerd, Premier ministre sud-africain considéré comme « l'architecte de l’apartheid ». Un récit à la première personne et des images Super-8 qui, même étrangères à cette histoire-là, résonnent et nous accompagnent pour « comprendre depuis l’intériorité comment la condition sociale et politique d’un système colonial, liberticide, rend fou. »
Pierre Primetens n'a presque pas d'archives familiales. Pour La Photo retrouvée il est allé fouiller dans celles des autres – alors il raconte son histoire en nous montrant d'autres images que les siennes, d'autres vies que la sienne, qui sont nos vies, à tout le monde en même temps. Son histoire est d'enfance, sa voix nous raconte les maltraitances qu'il a subies. Et la nécessité absolue d'en sortir et pour cela, de dire. Et pour cela, de montrer, d'une manière ou d'une autre : ce seront toutes ces images d'un fonds public dans lesquelles il ira piocher. Pour reconstituer ce qui a été tu, ce qui est perdu, et aussi pour permettre aux spectateurs de s'immiscer dans ce récit, en se reconnaissant un peu, peut-être, parfois, au détour d'un plan...
Précisons que La Photo retrouvée est un film accompagné par Tënk en production !
Nous finirons avec des éléphants. Et avec cette petite légende qu'on a envie de croire : un jour quelqu'un aurait retrouvé dans le fond d'une vieille roulotte de cirque des bobines de film toutes abîmées. La Fondation Home Movies – Archives du film familial, organisation italienne de préservation du cinéma amateur, prit en charge ces bobines et les restaura le mieux possible. C'étaient des images dingues : oui des films de famille, mais quand même, c'est pas tous les jours qu'on a des zèbres au fond de la photo ! En résulte un film de pure archive dans lequel on assiste à la vie de ce cirque : famille, travail, voyages, tournée : c'est le grand Circo Togni Home Movies !
Bons films !
Les éditos passés




