Dans ces images, une liberté perdue. Celle du filmeur de rue, autorisé, sans autorisation, sans papier signé, à aller chercher en longue focale les regards et les silhouettes des passants inconnus et à jouer avec eux, leurs attitudes, leurs postures et croisements. C'est un espace public disparu qui se montre à nous dans ce court métrage : une France passée, un Paris d'un autre âge, mais dans lequel le peuple semble encore avoir une place.
Le film est un jeu, entièrement construit sur le plaisir musical et rythmique du montage. Belles matières à tisser, pour le monteur, que celle du jazz de Michel Legrand et des images de Pierre Lhomme et Chris Marker ! Le jeu est entraînant, enlevé, drôle, on y plonge sans réserve. Et puis on se souvient des mots d'Aragon, entendus au début : "Ah je suis bien votre pareil / Ah je suis bien pareil à vous". Alors, à force de visages, survient un sentiment : celui d'être l'un d'eux.