« Je préfère voler que vendre mes fesses. » Dans un café, Sandrine raconte sa vie à Solveig Anspach. Dans le miroir derrière elle, on aperçoit la cinéaste, elle aussi toute jeune. On pourrait croire à deux amies partageant une Vittel fraise, si ce n'est que leur rencontre eut lieu quelques années plus tôt dans une salle d'audience. Sandrine, c'est un sourire, une gueule d'ange mais aussi le manque d'amour familial, la fugue d'une mineure, la débrouille et le vol avec une copine dans le quartier de Pigalle et la case prison. Plus que le portrait d'une artisane pickpocket, Anspach nous livre sans jugement un film de rencontre, instantané humain des marges et du Paris populaire de la fin du siècle dernier. Celle qui fabriquait son cinéma avec ses ami·es dans les faubourgs de Montreuil, se place clairement du côté de celle qui a osé tenir tête aux hommes de loi. Anspach fait de ce film, devenu culte, une ode à la liberté, à la jeunesse et à la vie. Le portrait solaire d'une femme forte, assurément. De celles qui tentent de tordre le cou au destin et aux déterminismes sociaux.

Éva Tourrent
Responsable de la programmation et co-directrice artistique de Tënk