Résumé
La Corrèze est un département du Limousin. Champseix est un hameau situé aux abords de Bugeat, une bourgade de 800 habitants. Le lac de Viam se situe à équidistance, à 5 kilomètres environ. La diagonale du vide, une caméra DV, la fin de l’année 2016.
L'avis de Tënk
D’abord, c’est comme un rapport audiovisuel de garde champêtre. Montées dans l’ordre où elles ont été tournées, des images ramassées dans un mélange d’indifférence et de méthode documentent ce qu’il est permis de voir au milieu de la diagonale du vide, dans un nulle part de campagne française situé par les panneaux en Corrèze, aux environs de Bugeat, village de 803 âmes, et pas une dans le film. Sentiers, bois mort, chemins creux, gravats, clochers, tôles rouillées, bornes routières, voitures abandonnées, volets fermés, panneaux qui disent "À vendre" sur des maisons que personne n'achète. Autour : un silence d’aboiements et de voitures qui passent, sous quoi grince la mécanique catarrheuse de la caméra DV. Parfois, aussi, on entend l’œil tousser. À mesure qu’avance la procession d’images (tac, tac, chaque coupe fait un clignement d’yeux, ou un coup de fusil muet), c’est l’œil qui intéresse, plus que le néant qu’il récolte en natures mortes. Œil de robot anxieux en vacances, ou en retraite. Peut-être celui de "La Région centrale" de Michael Snow, oublié au Canada d’où il aurait fugué, fatigué de ses pirouettes et réfugié quarante ans plus tard à Bugeat, ou clignent machinalement ses derniers réflexes de braconnier d’images, inutile et entêté. Et quand, parmi les aboiements et les voitures, se niche à mi-film une pièce ferrailleuse de John Cage (ou est-ce la bande-son de "Massacre à la tronçonneuse" ?), on dirait que l’œil-robot se fait pour lui seul, avec le bois mort et les vieilles tôles, une petite kermesse païenne. Là, il a l’air très heureux — il a trouvé son paradis.
Jérôme Momcilovic
critique et membre du comité de sélection de Cinéma du réel