Le bonheur à la plage c'est bon pour les catalogues d'agences de voyage. Pick Up se délecte un temps de la contemplation des vacanciers. "À la Tati", pourrait-on dire, ou bien "à la Martin Parr", nos petits ridicules de plagistes sont scrutés : on est des grandes personnes qui jouent à la raquette, font de la gym en chœur ou se laissent ballotter sur les vagues par un matelas pneumatique. Mais cette possible tendresse du regard, dans le film de Lucia Sanchez, prend progressivement un autre tour. Accompagnées notamment d'une musique expressive qui tord le documentaire pour lui donner un ton de film de genre – fantastique ? horreur ? –, les séquences font monter une inquiétude. Une intranquillité : que devenons-nous, individuellement, pris que nous sommes dans ces loisirs stéréotypés ? Quel besoin avons-nous, lorsque notre temps est libre (en vacances ou en retraite), de le remplir d'une autre contrainte : celle de se conformer à une image toute faite du loisir parfait ?

Jérémie Jorrand
Responsable de l'éditorial et de la programmation de Tënk