Résumé
Le soir du 30 avril 1971, un public de lettré·es et de militant·es se presse à l’hôtel de ville de New York pour voir l’écrivain, scénariste, réalisateur et acteur Norman Mailer (qui vient d’écrire “The Prisoner of Sex”) débattre avec un panel d’intellectuelles féministes. Le sujet est la libération des femmes, question sur laquelle Mailer se fait l’avocat du diable. Pour le mettre à l’épreuve sont notamment réunies l’écrivaine et critique Jill Johnston (autrice de “Lesbian Nation : The Feminist Solution”), la critique littéraire Diana Trilling, la présidente de la National Organization of Women (NOW), Jacqueline Ceballos, et peut-être son adversaire la plus coriace, l’autrice de “La Femme eunque” à la langue affûtée, Germaine Greer. Cet événement a fait date, et ce film se révèle stimulant ainsi que diablement divertissant.
L'avis de Tënk
“Town Bloody Hall” est une étonnante capsule temporelle qui mérite d’être revisitée : si de nombreux sujets de discorde semblent dépassés, le cœur de la discussion entre le misogyne Mailer et un groupe d’intellectuelles/guerrières féministes états-uniennes est toujours brûlant, vu l’état pitoyable de certaines émissions télé et de débats journalistiques d’aujourd’hui. Malgré les huées et le côté théâtral très années 70, et une vulgarité grossière qu’on voudrait ne plus entendre, la soirée fut l’occasion d’un échange pimenté mais civilisé de points de vue bien ancrés, et Chris Hegedus réussit à saisir un moment capital pour le cinéma direct américain : un documentaire-performance oublié pendant quarante ans et qui est désormais devenu un véritable chapitre de l’éternelle histoire de la guerre des sexes, dans la plus pure tradition hollywoodienne.
Federico Rossin
Historien du cinéma, programmateur indépendant