Résumé
Devant la caméra bienveillante de Mira Nair se libèrent, parfois jusqu’au rire, les paroles de danseuses et prostituées indiennes dont certaines ont fui des mariages forcés, tandis que d’autres sont encore mariées.
L'avis de Tënk
Plutôt que de reproduire la réification des danseuses de cabaret, Mira Nair filme leurs numéros comme des comédies, des jeux de dupes que les femmes tentent de tourner à leur avantage. L’environnement chaleureux du club apparaît comme un lieu où le désir masculin est encadré, et rétablit une forme d’équilibre : ici au moins, les regards désirants portés sur les femmes servent à financer leur liberté future. C’est au-dehors que se manifeste le plus durement la condition des danseuses : harcelées par les mêmes hommes qui aiment les voir dénudées, elles sont aussi mises à l’écart par leurs familles. Rekha, Rosy, Sona sont aux premières loges de l’injustice patriarcale, et ainsi détentrices de vérités méconnues, lucidité adoucie par la sororité qui les unit. En la cinéaste, qui a vécu plusieurs mois avec elles avant d’entamer le tournage, elles trouvent l’alliée qui pourra exposer au grand jour les hypocrisies dont elles sont victimes, et qui nous concernent tous, aujourd’hui encore.
Olivia Cooper Hadjian
Membre du comité de sélection de Cinéma du réel,
Critique aux Cahiers du Cinéma