Résumé
Dans les années 1920, Henry Ford fit bâtir la ville de Fordlândia, en plein cœur de l’Amazonie, pour cultiver tout autour des plantations d’hévéas dont le caoutchouc servirait à la fabrication de pneus. En août 2018, le collectif Suspended Spaces a organisé une résidence dans ce lieu en collaboration avec le collectif brésilien Fotoativa. Lors de ce séjour, André Parente et Camille Varenne ont rencontré Kaynã Podsiad, un jeune garçon de 11 ans qui a grandi à Fordlândia. Il est aussi youtuber et il a fondé la chaîne KasumoPro où il publie ses montages vidéos faits à partir de mangas et de vidéos glanées sur le net. Il propose aux deux artistes une visite guidée de la ville où faits réels et historiques se mêlent aux anecdotes et à l’imaginaire de l’enfance. Le film “Pedra e Poeira” retrace cette rencontre rythmée par le récit d’une Histoire en mouvement, une Histoire en partage.
L'avis de Tënk
Plusieurs temps se mêlent à Fordlândia. Un passé, d’abord : les ruines de l’industrialisation à outrance, les signes des impasses du capitalisme, de l’exploitation intensive des ressources naturelles. Un présent : la joie irradiante de cette rencontre avec le jeune Kaynã Podsiad, dont les démos Youtube sont vues dans le monde entier et qui fascine davantage la caméra que ne le fait la ville. Un futur enfin : ce garçon va vite, il ne connait pas si bien le passé fou de sa ville (au sujet duquel Herzog écrirait actuellement une série) et, tourné vers l’avant, il déroule un récit aux mille disgressions qui active et révèle les rues, et triomphe de l’Histoire. Au cœur de cette simple déambulation, il y a la jouissance du récit et des corps dans l’exercice de leur mémoire et de leur imaginaire. Que fait la parole à un lieu ? Que fait l’enfance à la parole ? Que fait le doute, celui des spectatrices et spectateurs face à des propos aléatoires ?
Charlène Dinhut
Programmatrice et commissaire d’exposition
Lire le texte de Lucie Garçon à propos du film "Pedra et poeira" sur le site de la revue Débordements.