Résumé
Annexée par la Russie après la 2e guerre mondiale, peuplée par des colons venus de Russie ou des États baltes, la région de Kaliningrad est aujourd’hui une enclave russe au sein de l’Union européenne, entre la Pologne et la Lituanie. Jadis, le village de Gastellovo était une foire importante pour les fermiers. Aujourd’hui, après le déclin de l’empire soviétique, c’est un village à demi éteint où la nature semble vouloir reprendre ses droits sur l’homme. Là, des enfants livrés à eux-mêmes inventent ensemble, dans les lieux désertés par leurs parents, un univers de jeux et une société utopique à la limite du fantastique.
L'avis de Tënk
Plus question ici de Groß Friedrichsdorf et de Ostpreussen. Les derniers Allemands - ils avaient confié leur mémoire à la caméra de Volker Koepp dans “Kalte Heimat / Froide Patrie” une petite quinzaine d’années plus tôt - ne sont plus… C’est avec dans ses bagages quelques réminiscences enfantines de la plume de Johannes Bobrowski, son poète préféré, que le réalisateur va à la rencontre des plus jeunes des habitants de Gastellovo. Les adultes y semblent absents. Les enfants ne s’en plaignent pas - au contraire, car leurs parents sont alcooliques, bagarreurs et incapables de leur dessiner un avenir. Ce sont donc les ados qui se prennent en main, que ce soit pour les tâches agricoles et ménagères ou pour les quelques divertissements à leur portée.
Koepp les filme par fratries ou individuellement, enregistrant leurs états d’âmes dans une série de longs face-à-face ou se faisant fin observateur de leurs jeux et besognes. Le surprenant naturel de leurs récits qui vacillent entre propos mystique, réflexion clairvoyante et désir d’ailleurs, contraste avec la raideur et le ridicule des rares “événements”, comme cette cérémonie de rentrée scolaire censée leur rappeler la lointaine “mère-patrie” russe. Leurs paroles et rêves - rêves partagés par tous les enfants de la terre - rythmés par des images de la nature, tableaux presque magiques animés par un vent incessant, deviennent alors les puissants ressorts émotionnels de ce dernier documentaire du cycle que Volker Koepp a consacré à l’ancienne Prusse Orientale.
Jürgen Ellinghaus,
réalisateur